#LiaEnScandinavie, chapitre 18 : 26/08/2015 – De la pluie aux écureuils
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L’aube du dernier jour se lève… La nuit a à nouveau été difficile : beaucoup de bruits et des gens pas très respectueux du sommeil des autres dans la chambre. C’est un peu agaçant. Du coup, je m’octroie à nouveau une grasse matinée et suis à nouveau la dernière à sortir de la chambre.
Aucun regret : il est 9h30, j’ai rendez-vous à 16h ici même avec E., et j’ai large le temps de faire tout ce que je veux. Mais si.
Le poids de tout le voyage commence à peser un peu et je me sens marcher au ralenti. Il serait grand temps que je dorme dans un vrai lit – et que je sache comment je rentre, aussi.
Je prends donc le temps de m’installer dans la salle commune pour un petit déjeuner de roi, faire ma réservation de train Paris-Lyon pour demain soir (demain soir ! Je ne réalise pas), et avancer dans ma mission cartes postales, qu’il commence à être urgent de finir.
Le petit déjeuner en question : cinnamon rolls et mocca glacé, le luxe !
J’adore cette carte postale, qui représente merveilleusement ma situation financière.
J’achète les dernières cartes et les quelques timbres qui me manquent, copie une ou deux nouvelles, et fais mon trajet pour aujourd’hui : d’abord le monument Sibelius, que j’ai vraiment envie de voir. Il a l’air atypique et interactif ! Puis un tour sur l’île de Seurasaari et son musée en plein air, puis un retour à pattes en traversant Töölö.
Une fois prête, je me décide enfin à mettre le nez dehors. Et là, désarroi profond et scénario imprévu : il pleut à verse.
J’ai tellement été habituée au beau temps durant tout le voyage que je n’avais même pas imaginé que cela puisse arriver. Je me sens bête, devant la porte de l’hostel, à regarder les trombes d’eau tomber sans savoir quoi faire. Je suis fatiguée, je resterais bien à écrire au calme, au fond. Et en même temps, j’ai envie de voir le monument Sibelius. Que faire ?
Je négocie avec moi-même pendant au bas mot vingt minutes. Cela donne à la pluie le temps de passer de « seau d’eau » à « gouttes grosses et pénibles mais qui n’empêchent pas de marcher dessous ». Une petite voix sur Twitter me dit très justement : « écrire, tu peux le faire où tu veux, mais tu ne retourneras peut être pas de sitôt à Helsinki. » Ce n’est pas totalement vrai, mais ça reste pertinent.
Allez, j’y vais.
Je marche donc vingt bonnes minutes sous la pluie, en me félicitant d’avoir choisi des chaussures qui ne prennent pas l’eau pour ce voyage. Le paysage est un peu triste, morne. Je me mets de la musique dans les oreilles pour me tenir compagnie (le Poui n’est pas d’une grande conversation : vu le temps, il préfère se blottir au chaud dans mon sac. Et dire qu’il est écossais ! Il renie ses origines.)
Pas de pot : mon baladeur est mort, il me faut donc faire avec la musique sur mon téléphone, et je n’ai QUE du Sonata Arctica, et tout sauf envie d’écouter ça. En même temps, ça se laisse écouter, c’est chouette, bon, tant pis. Va pour Sonata Arctica. Ce groupe a le don d’être toujours là quand j’ai besoin d’une « bande originale » pour ma vie. Ca ne vous fait jamais ça avec certains artistes ? Vous avez l’impression d’avoir déjà tout entendu, de tout connaître par cœur, et puis soudain, pouf, vous découvrez une chanson qui va pile poil avec la situation que vous êtes en train de vivre… Voilà : pour moi, cet artiste, c’est Sonata Arctica. Enfin, le Sonata Arctica de jusqu’à 2012. Parce qu’après, bon… Rappelez-vous ma réaction au concert.
Bref, fin de parenthèse ! Je marche donc d’un bon pas, capuche sur la tête. Vu la météo, je ne croise pas grand monde…
Arrivée au parc Sibelius : c’est désert.
Je suis fascinée. Les tuyaux finement ciselés qui résonnent quand sollicités par le vent (ou moi qui frappe des mains dedans), la géométrie vraiment bizarre du monument… J’adorerais trouver une statuette du monument à rapporter chez moi.
Je passe au moins vingt minutes à faire mumuse avec le monument, jouer avec la résonance, faire de la percussion dessus. Il n’y a personne pour venir me déranger, c’est juste le Poui et moi. Le Poui qui s’amuse à aller chanter dans les tuyaux, lui aussi.
Ensuite, je n’ai plus qu’à longer la côte pour atteindre Seurasaari. La marche est un peu glauque, entre ciel gris, bords de routes qui craignent un peu et forêts peu accueillantes. Bon, le fait que j’aie Everything Fades to Gray dans les oreilles n’aide sans doute pas. Je cogite, tout le trajet. Je règle mes comptes, pas mal. Elle n’est pas très drôle, cette journée. Je pense à la petite phrase sur mon pied droit et je continue à le mettre devant mon pied gauche, encore et encore.
Je suis quand même assez soulagée de voir le pont menant à Seurasaari se dessiner au loin après une demie-heure de marche.
Clairement, la faune n’est pas farouche et habituée à voir du monde.
Je traverse donc le pont et arrive enfin sur l’île. Il pleut toujours, il est 11h30, et dans ma tête c’est la guerre. J’y vais ? Je n’y vais pas ? Je ne comprends pas trop pourquoi mais j’ai du mal à aller sur cette île, j’ai l’impression de perdre mon temps. Le fait qu’il fasse moche ne m’aide pas.
Dans ma tête, les mots de mon ex-psy : « De quoi avez vous envie ? »
Foutue question à laquelle je suis toujours incapable de répondre. Là, je suis tiraillée entre les deux extrêmes : jouer les casanières, me trouver un café sympa et écrire, ou alors aller visiter et avoir des choses à raconter.
Et puis bon. Pourquoi je tergiverse avec moi-même ? De toute façon, j’y suis : autant y aller. Je trouve un compromis en me fixant un délai horaire sur l’île et en ne payant pas l’entrée du musée : ça veut dire que je ne pourrai pas entrer dans les bâtiments, mais déambuler sur l’île en profitant des explications.
En route pour la visite de Seurasaari, donc !
L’île est envahie de touristes chinois.
A Luleå, notre couchsurfeur, M., nous a expliqué que ce symbole indique un lieu à intérêt touristique. Je ne connaissais pas du tout, mais je l’ai retrouvé en Suède, en Finlande et en Norvège. On a un équivalent ?
Cette petite maison date du 19ème siècle et était utilisée pour faire sécher la paille.
Un village à l’ancienne : les bâtiments datent du 18ème siècle, mais ont été amenés sur l’île pour construire le musée à ciel ouvert.
L’église, un bâtiment du 17ème siècle. Le seul qui m’ait fait vraiment regretter de ne pas avoir payé l’entrée du musée, en fait.
C’est sympa de déambuler au milieu de ces vieux bâtiments et de lire leur histoire, et ça fait beaucoup penser à Djurgården. Cela dit, le meilleur reste à venir : je commence à apprécier pleinement Seurasaari en m’éloignant de la partie musée et de ses touristes chinois, pour aller me perdre dans la partie plus sauvage où il n’y a littéralement PERSONNE. Même la plage nudiste est vide !
Je décide de suivre une route au hasard et me retrouve bien vite totalement perdue, mais les paysages sont chouettes. Et puis bien vite…
Ils ne sont vraiment, VRAIMENT pas farouches.
Celui-là m’attaque le pied, puis fait un bon en arrière.
Le Poui a un nouvel ami.
Tout ça lui donne bien envie de retrouver une vie sauvage… (Mais faut pas déconner non plus, il a pris l’habitude de son petit confort.)
Après cet épisode de mignonnitude absolue (je n’arrive pas à mettre la vidéo, mais j’ai eu aussi une pause de cinq minutes, le temps de regarder un écureuil dévorer une pomme de pin. Ca mange VITE et ça ne laisse rien, ces bestioles, dites donc…), je reprends mon tour de l’île et recommence à me perdre totalement. Pendant une vingtaine de minutes, je n’ai plus aucune idée d’où je suis, ni de si je suis réellement en train de faire le tour, ni si je me rapproche de la sortie.
Et pourtant je tente de longer la côte le plus possible. Je ne comprends rien à la géographie de cette île.
Ces escaliers ne paient pas de mine mais ils viennent avec une anecdote rigolote. L’ancien président finlandais aimait faire son jogging sur l’île, et pour garder la forme, il s’entraînait à sauter sur les escaliers en courant, le plus haut possible. Ca mettait un peu ses accompagnateurs grognons, parce qu’il commençait à être un peu âgé, mais n’empêche qu’à 75 ans, il pouvait encore sauter sur la deuxième marche à partir du haut. Une fois il a même atteint la première, mais il a décrété que ça ne comptait pas parce qu’il avait utilisé la rampe.
J’ai retrouvé la mer et elle a l’air du bon côté pour rejoindre le pont ! Continuons sur cette lancée. (Notez au passage qu’il ne pleut plus même si le ciel est moche.)
Enfin, je retrouve l’entrée de l’île, avec trente minutes de retard sur l’horaire que j’avais prévu, mais je suis quand même très très large pour être à l’auberge de jeunesse à 16h pour retrouver E., alors je décide de refaire un petit tour au monument Sibelius. Je ne m’en lasse pas.
Sur le chemin du retour, je tombe sur ce panneau.
Je comprends Ronald McDonald, et Hus doit vouloir dire « maison ». BON. ALLONS VOIR. Je suis intriguée.
Après avoir traversé un parking hyper glauque et marché un peu, je tombe donc sur ça :
La déception. En fait, il s’agit des maisons d’accueil de la Ronald McDonald Fundation. Bon bah… Tant pis ! A quoi je m’attendais, en fait ?
Je me remets en marche pour ma nouvelle promenade de trente minutes. Cette fois-ci ce n’est pas sous la pluie, et comme je connais le trajet, c’est beaucoup moins pénible. Je longe à nouveau les quais et me retrouve à nouveau face au monument Sibelius. Toujours désert.
Le Poui non plus. Il aimerait bien avoir une maison de vacances ici.
Après quinze nouvelles minutes à jouer dans les tuyaux, je fais le chemin du retour jusqu’à l’auberge, un peu en retard. E. me rejoint très rapidement, elle non plus n’était pas à l’heure : elle devait aller à Suomenlinna, mais a finalement abandonné vu le temps. Du coup, elle est retournée dans le centre, puis est allée nager à la piscine de Töölö.
Nous partageons des opinions similaires sur Helsinki, et sommes toutes les deux un peu déçues. Cette ville est trop grise et trop austère comparée aux villes que nous avons vues avant ; c’est une capitale, c’est intéressant, mais le charme n’opère pas, il n’y a pas le coup de foudre que nous avons eu, elle pour Oslo, moi pour Falun ou Stockholm…
Une petite douche, puis nous décidons de faire un tour ensemble dans Töölö pour notre dernière soirée. Nous retournons donc à un autre endroit au bord de la mer, pas loin de celui où nous avons trouvé le croissant brie-fraise.
Pour moi, ce sera tarte au saumon, cinnamon roll maison et limonade.
Le Poui aime toujours autant la vue. Remarque : vous avez vu comme il fait beau maintenant ? La météo, ce troll.
Après un bon repas, nous déambulons donc et apprécions le SOLEIL DE CETTE DOUCE FIN DE JOURNEE. (C’est bon, vous avez le ton vaguement amer, là ?)
Le quartier est très sportif, c’est intéressant de voir tous les dispositifs mis en place pour la forme des habitants !
Nous rentrons ensuite à l’auberge, mais elle se fait vite rappeler par des connaissances qui l’invitent à se rendre dans un bar steampunk du centre. Elle me laisse donc dans la salle commune, à écrire, et file retrouver du monde en ville.
J’avance donc sur mes dernières cartes postales et seule une conversation en français à côté de moi me fait relever la tête. Deux jeunes hommes ont entamé une conversation avec une demoiselle, ils disent qu’ils partent dans la nuit. Du coup, je m’approche, attrape une chaise, et m’incruste dans la conversation.
Les deux sont Genevois, ils sont partis de Genève le 1er juillet et ont fait Suisse, France, Belgique, Pays Bas, Danemark, Norvège, Suède, Finlande… en vélo. C’est très chouette de discuter de leur expérience. La demoiselle est thésarde en pharmaco et ne parle pas très bien anglais, alors ça la rassure de parler en français. La conversation est plaisante, nous échangeons nos impressions sur Helsinki pendant presqu’une heure.
Au milieu de la conversation, E. revient, assez furieuse : le bar était très sympa, mais cher, et ses connaissances lui ont laissé la note. Elle se sent roulée et parle très vite. En anglais. Au milieu d’une conversation en français. Nous assistons donc à un moment un peu surréel où elle décrypte notre français, je ne sais plus trop si je parle anglais ou français, et suis totalement adaptée aux deux, alors que la thésarde en pharmaco, elle, est assez perdue. C’est malgré tout assez amusant. E. indique l’emplacement de Steam, le bar Steampunk (très original…) aux deux Genevois qui n’ont pas prévu de dormir et vont boire avant d’aller faire la fête, puis nous retournons au dortoir. Il est grand temps de nous préparer et dormir…
La porte du dortoir. L’auberge a une déco intéressante, à mi-chemin entre hôpital et couloir d’affiches débiles.
Voilà.
Mes dernières cartes sont écrites et je les posterai de l’aéroport. Il est 21h30, j’ai à nouveau bien crapahuté aujourd’hui, et suis contente de pouvoir dormir. Les co-dortoirières ne sont pas discrètes, mais tant pis : le réveil sonnera à 3h30 et le lit est confortable. Ce n’est pas le moment de faire un scandale, autant profiter un maximum du peu d’heures qu’il me reste à dormir.
Demain, je vais faire un tour en Norvège… Puis c’est l’inévitable retour en France. Le voyage touche à sa fin.
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