Les nouvelles du Ray’s Day ou la saga de la Tour – partie 1
17 septembre 2015(Pour rappel, chaque nouvelle a été écrite sur une carte postale et envoyée à une personne différente, le challenge étant de faire en sorte que toutes les nouvelles soient compréhensibles en tant que one-shots tout en faisant partie d’un tout.)
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James recalcule, encore et encore. Son bureau est dévoré par les feuilles couvertes de symboles incompréhensibles pour un œil extérieur. Du haut de son statut d’apprenti, il ne pèse pas grand-chose, et pourtant, si ce qu’il a sous les yeux s’avérait vrai…
Mais comment les chercheurs qu’il assiste ont-ils pu à ce point passer à côté ? Tout est là, pourtant. La chaleur, la sécheresse, le temps qui passe plus vite, tant de signaux d’alarmes…
Et dire qu’il ne faisait que calculer une ridicule valeur d’intensité solaire au départ.
D’une main tremblante, il appuie sur le bouton de communication à côté du bureau.
Un grésillement lui répond, puis un bip indiquant qu’il est écouté et enregistré. James prend une inspiration. Comment délivrer un tel message ? Finalement, il se lance.
« Professeur, je crois qu’il va falloir avancer la date de la fin du monde de quelques millénaires… »
– Carnets du labo. Jour 1 du Crépuscule terrestre.
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Thobbes n’avait jamais aimé le nom de « crépuscule terrestre ». C’était si négatif, comme si tout allait s’éteindre !
Il n’en était que plus fier de faire partie de la première expédition. Il espérait bien que cela permettrait de changer de perspective. Il avait tout plaqué pour ça – famille, boulot, vie quotidienne, tout rayé.
Tout pour pouvoir faire partie de l’équipe de création du bureau de l’Exploration.
Et maintenant, il allait décoller. Ils étaient une petite équipe, ils avaient trouvé une planète.
Les gens étaient divisés : les incrédules, qui les prenaient pour des fous, et ceux qui plaçaient tous leurs espoirs en eux, ayant pris conscience du cataclysme à venir.
Lorsque la navette de la première mission d’exploration sortit de l’atmosphère terrestre qui devenait de plus en plus chaude, le cœur de Thobbes se serra, mais il ne put réprimer un sourire.
La fin du crépuscule était arrivée.
– Journal de l’Exploration. Aube astrale : jour 1.
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Pekko frissonna. Malgré ses origines nordiques, il avait perdu l’habitude de telles températures avec la chaleur qui grimpait de plus en plus sur Terre. Pourtant James, leur grisonnant scientifique de bord, les avait prévenus. Mais il y avait savoir en théorie et subir en pratique.
Le froid n’était pas intolérable, toutefois, et James leur avait assuré que ce n’était que pour une saison, comme celles qui avaient été déréglées sur Terre. Ils survivraient. Sur ordre du capitaine Thobbes, ils arpentaient la surface de la planète à la recherche d’une preuve du bien fondé de leur expédition. Ils tournaient depuis des semainess sans rien trouver. Pekko en aurait hurlé ; tout ça pour rien. Perdu dans ses pensées sombres, il jeta un coup de pied rageur dans une roche qui vola aisément étant donné la différence de gravité. Et s’immobilisa.
Sous la roche qu’il venait d’éjecter, pris dans la glace, un objet d’apparence végétale scintillait.
Pour la première fois depuis l’atterrissage, Pekko s’autorisa un sourire. La première mission d’exploration était un succès : les Hommes pourraient s’installer ici.
– Journal de l’Exploration. Aube astrale : jour 27.
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Ils ont commencé la construction. Cela faisait longtemps que Gary en parlait, mais je n’y croyais pas. C’etait un projet trop fou. Physiquement, ça n’aurait jamais pu tenir debout – littéralement. Et puis un jour Gary a été appelé sur le chantier. Alors le doute n’était plus possible.
Je fais partie des sceptiques, ceux qui ne croient pas aux discours alarmistes de certains scientifiques qui attestent que nous finirons tous grillés par le soleil. Mais si cela permet de faire avancer les expéditions, alors je suis ravi.
Dans quelques années, la Tour surplombera la planète. Elle sera le phare des navettes d’exploration, et nous pourrons voler librement.
Je vais sans doute essayer de rejoindre le chantier dès demain.
– Carnets des Bâtisseurs. Aube astrale : jour 56.
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Trente-cinquième expédition. Le poids pesait sur les épaules de Lina, seule chef à bord. Les cinq dernières expéditions avaient toutes été de cuisants échecs, et ils étaient des centaines de milliers sur Terre à attendre de bonnes nouvelles.
Il faisait froid -on l’avait prévenue, mais il faisait beaucoup plus froid qu’à son habitude. Le climat de la Terre était devenu brûlant avec les années.
Alors qu’elle tournait encore et encore à la recherche de quoi que ce soit qui pourrait justifier leur expédition, une étincelle de lumière accrocha son regard en hauteur. Lina ne voyait pas bien à cause de son masque protecteur ; elle l’arracha.
Serpentant devant elle, dans toute l’immensité du ciel, une lumière verte irradiait.
Émerveillée, Lina en oublia de sécher les larmes qui s’étaient mises à couler spontanément et commençaient déjà à geler sur ses joues.
Lina s’en moquait. Les aurores existaient sur d’autres planètes : une telle découverte méritait bien un tour à l’infirmerie.
– Journal de l’Exploration. Aube astrale : jour 225.
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Le torse bombé par la fierté, Maistre Andréi s’avança vers le faisceau de lumière. Derrière, la Tour – ou plutôt ce qu’on pouvait en voir, car elle était si grande que le sommet n’en était même pas visible – défiait toutes les lois de la physique telle qu’on la voyait quelques siècles plus tôt. Maistre Andréi n’était pas à l’initiative de la construction de la Tour, mais il aimait rappeler qu’il l’avait suivie et financée de bout en bout.
D’un mouvement leste, il effleura le faisceau lumineux, qui se déploya en éventail en perçant les nuages pour aller atteindre le haut de la Tour. Il y eut un temps, un long silence. Puis, un son emplit l’espace jusqu’à faire trembler la Terre.
Maistre Andréi se rengorgea. Le signal était établi : les Terriens seraient enfin libres de voyager.
– Inauguration de la Tour. Ere astrale : jour 1.
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